Naturel? Oui mais où?

J’aimerais expliquer certains conseils que j’ai pu prodiguer parfois et qui ont visiblement suscité des réactions de la part de ceux qui me connaissent. Notamment le sujet « couverture », a visiblement ébahi pas mal de monde. Je n’ai pourtant jamais été contre ou pour ou comme tout autre produit ou soin, il en va d’observer et de tâcher d’adapter au cheval qui est sous nos yeux.

Cheval au « naturel », « soigner son cheval naturellement », « alimentation naturelle du cheval » etc, combien de fois lisons-nous ces expressions parmi les adeptes du retour à la nature du cheval ? Certains cavaliers éprouvent en effet le besoin de faire vivre leurs chevaux plus proche d’une vie « naturelle », ce qui implique pour beaucoup « pas de box », « pas de fer », « pas de céréales », « pas de tonte », « pas de couverture ». On dirait même que lorsque l’on commence à envisager le cheval autrement que par le biais d’une détention et d’un mode de vie conventionnel, on commence par renoncer à l’un de ces critères et les autres suivent logiquement…bien souvent en mettant son cheval pieds nus, on renonce également assez vite au box, à l’alimentation à base de céréales, à lui mettre une couverture et ceci devient irréfutable

Est-ce bien juste pour autant ?

NATUREL….QU’EST-CE QUE CA VEUT DIRE?

Il est malgré tout légitime de se poser la question de savoir si le terme « naturel » est réellement approprié au mode de détention « alternatif » que nous proposons et si il ne nous induit pas en erreur de perception du cheval.

Qu’est-ce qu’un mode de détention en stabulation a de « naturel » pour un cheval ?

Est-ce qu’un paddock paradise est « naturel » ?

Est-ce qu’un râtelier posé au milieu d’une place stabilisée est « naturel » ?

Est-ce que l’emplacement du râtelier arbitrairement choisi par l’homme pour des raisons topographiques et non climatiques est l’emplacement où les chevaux passeraient le plus clair de leur temps si nous n’avions pas choisi pour eux ?

Est-ce que l’abri que nous proposons offre 100% du confort dont le cheval a besoin pour être à l’abri et maintenir sa température avec le moindre effort en hiver ?

Le foin que nous proposons est-il l’alimentation « naturelle » du cheval ?

A toutes ces questions je répondrais bien souvent « non » et je rajouterais que la détention NE PEUT ÊTRE NATURELLE, en tout cas dans nos contrées, avec souvent des surfaces limitées et un nombre d’individus souvent trop élevé sur lesdites surfaces.

Selon ma perception « pieds nus-stabulation-à poils-sans couverture-sans complément à base de céréales » c’est un moyen de se rapprocher des besoins fondamentaux du cheval pour lui offrir une vie de troupeau, la liberté de mouvement, avoir du foin à volonté mais en AUCUN CAS ce n’est un environnement, un logement et une alimentation naturels. [read more]

DANS LA NATURE CE SERAIT COMMENT ?

La nature offrirait au cheval des centaines d’hectares d’une végétation de type steppe et non du foin, dans la plupart des cas bien trop riche et déséquilibré en sucres/protéines.

La nature offrirait au cheval le choix de ses compagnons de troupeau et non un troupeau artificiellement crée par les besoins des humains où tous ne cohabitent que contraints et forcés, plus ou moins bien d’ailleurs.

La nature offrirait au cheval des zones où le sol réverbère la chaleur par temps froid et il ne se tiendrait pas forcément là où l’on a décidé de mettre le foin.

La nature offrirait des couverts végétaux contre la pluie et non des abris en béton qui, certes le protègent de la pluie, mais ne lui fournissent pas forcément la chaleur dont il aurait besoin pour réguler sa température sans puiser dans ses réserves en hiver.

La nature offrirait au cheval de ne pas être un produit de la sélection sur des critères de race et de beauté, lui offrant souvent une allure de star avec une peau fine, un poil soyeux, un grand gabarit. Ces critères physiques sont-ils vraiment ceux qui vont en faire un cheval robuste ? Il est clair que non et qu’un poney shetland ne sera pas armé de la même manière au froid qu’un arabe. De même que le poney shetland ne supportera pas de la même manière la chaleur que l’arabe ou l’ibérique…. Une silhouette gracile, aura une perte de chaleur plus importante qu’une silhouette ronde.

La nature offrirait au cheval une diversité de sols et de végétaux et non un foin ou une herbe trop riches qui déséquilibrent sa flore et son métabolisme à court terme si l’on ne complémente pas de manière adéquate. [/read] [read more]

Un peu d’observation

Si l’on observe, certains chevaux dits « rustiques » aiment en effet rester sous la pluie.

Personnellement les miens, qui ne sont pas des races dites « rustiques », vont aller s’abriter de la pluie et ne sortir que de temps à autre.

J’ai pu constater bien souvent, beaucoup de chevaux souffrir du froid et mettre en péril leur métabolisme et leur état musculaire. Certains, déjà fragiles métaboliquement, comme ceux ayant eu des fourbures, ceux ayant eu des coup de sang, ceux qui sont amaigrit, accusent particulièrement mal les refroidissements brusques. Ces chevaux, peut importe la race, qui font des fourbures en hiver, n’en sortent que si on les couvre ; c’est le moyen de briser le cercle vicieux dans lequel ils sont. Shetland ou islandais si ils sont en fourbure, doivent être couverts (oui, oui je sais….je vois déjà les yeux s’arrondir….les propriétaires desdits chevaux ont fait pareil, mais l’avenir a montré que c’était juste). Peu importe la race et la quantité de poils, expérience faite, ce n’est que comme ça que les mesures alimentaires mises en œuvre en urgence, portent vraiment leur fruit. Ceci s’explique métaboliquement, mais serait trop long à développer ici.

VOTRE CHEVAL A-T-Il FROID? Ou PLUTÔT DOIT-IL ETRE PROTEGE ?

Il y a différentes questions que l’on peut se poser afin d’y répondre :

  • Quelle race avez-vous ? Pour simplifier….une du sud, qui sera plus résistant au chaud qu’au froid ? Ou une du nord ?
  • Reste-t-il volontiers dehors par temps de pluie ou de vent froid ? Est-ce vraiment un choix ou doit-il rester dehors parce qu’il ne veut pas se mêler au groupe sous l’abri ou en est-il systématiquement chassé ?
  • Quel est l’état musculaire de votre cheval ? Est-il souple et délié ou a-t-il déjà une musculature plutôt « raide » ?
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  • Est-ce que vous constatez qu’il donne difficilement les postérieurs, qu’il est raide à la monte en hiver, qu’il a la queue plaquée contre ses fesses ? Si oui, peut-être que la position non physiologique pour manger aux râteliers par tous les temps ne lui convient pas et qu’il faut l’aider en le couvrant.
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  • Quel est le challenge métabolique de votre cheval ? est-il plutôt maigre et vous souhaitez qu’il reprenne du poids ? Combien de fois, on m’a demandé cet hiver, comment donner plus « d’énergie » à un cheval pour qu’il ne maigrisse pas? Mais avant de lui donner plus d’énergie, peut-être faut-il qu’il en perde moins …. A-t-il fait une fourbure récemment, ou est-il sujet aux élastoses ?
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  • Votre cheval maigrit-il entre décembre et janvier ? Si oui, ce n’est pas la bonne période, c’est souvent qu’il puise dans ses réserves !
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  • Votre cheval at-il beaucoup de poils, tout en étant maigre? Si oui, pourquoi fait-il autant de poil ? beaucoup de chevaux amaigris font un poil très important pour se protéger du froid ! Mais il serait bien qu’ils utilisent leurs calories, non pour faire du poil ou se réchauffer, mais pour se remplumer !
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  • Votre cheval est-il particulièrement calme ? Peut-être se met-il en mode « survie » ? Votre cheval est-il particulièrement de mauvaise humeur ? Peut-être a-t-il un inconfort ?
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  • Votre cheval bouge-t-il vraiment autant qu’il devrait ? La conception la plus répandue est, qu’à partir du moment où l’on offre une stabulation ou une « possibilité » de mouvement au cheval il va la prendre et faire des kilomètres comme on ferait des longueurs dans une piscine. La réalité est un peu plus complexe que cela et nos environnements sont souvent plus monotones que ceux qu’il trouverait dans le NATURE ! Va-t-il vraiment bouger autant que vous le pensez ? [/read] [read more]

 

Une photo valant mille mots, je concluerai par la photo d’Hicup, petit apaloosa

qui vit en stabulation, foin à volonté mais qui a beaucoup maigri cet automne,

il est dans un climat plutôt rude, et exposé et n’a pas vraiment accès à l’abri car ses congénères l’empêchent.

Voici la photo avant et après l’avoir couvert [/read] [read

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Conclusion

Il n’y a pas un cheval identique à un autre !

Il n’y a pas un environnement identique à un autre !

Par contre, pour la plupart d’entre nous, malgré nos efforts, nous n’offrons PAS GRAND CHOSE de naturel à nos chevaux, nous essayons juste d’assouvir au MIEUX leurs besoins fondamentaux : vie en société (mais laquelle ?), liberté de mouvement (mais laquelle ?), alimentation à volonté (mais laquelle ?) et nous ne pouvons croire qu’il suffit de les mettre en troupeau, en stabulation, sans fer, sans couverture, sans complément pour que ce soit juste. Certains auront besoin de certaines choses dans un environnement donné et moins dans un autre, ou plus du tout.

Une requête encore : ne dévoyons pas le « naturel » pour en faire un autre calvaire pour les chevaux !

En se questionnant, en observant et en acceptant de remettre toujours nos certitudes en questions, nous pouvons, je crois, les aider mieux. [/read]

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Isabelle Dorand

J’ai grandi aux quatre coins du monde, toujours proche de la nature. Dès mon plus jeune âge, je me suis passionnée pour les animaux. Aspirant d’abord à devenir vétérinaire, j’ai rapidement réalisé que ce métier ne correspondait pas à mes aspirations. Tout en poursuivant différentes activités en lien avec la nature et les animaux, j’ai suivi une formation d’ingénieure agronome.