La mise à l’herbe est toujours une période métaboliquement délicate.
Dans l’idéal elle doit se faire de manière progressive et sur plusieurs semaines, et elle dépend également chaque année des conditions météo rencontrées.
3 facteurs interviennent dans le maintien de la santé et du système digestif :
Un cheval au pré en continu, disposant d’une prairie suffisamment grande et bien enherbée, va brouter en moyenne 12 à 17 h par jour. Pour un cheval de 550 kg, on estime la consommation moyenne d’herbe à 50 kg d’herbe fraiche par jour (accès en libre-service au pâturage sur une prairie bien enherbée).
Pauvre en fibres, l’herbe de printemps amène moins rapidement de satiété et le cheval mange au-delà de ce qu’il devrait.
Au printemps (avril à juin), un cheval passant sa journée au pré peut ingérer une moyenne de 6 à 7 UFC quand ses besoins d’entretien ne sont généralement que de 4 UFC. S’ensuivent rapidement augmentation du poids et/ou acidification de l’organisme.
Souvent nos chevaux, ont, en hiver un foin beaucoup trop riche en fibres, pauvre en protéines et ils passent brusquement à un régime avec peu de fibres et beaucoup de sucres….
L’herbe de printemps est riche en sucres et protéines et pauvre en fibres. Elle est appétante et offre peu de capacité d’encombrement, donc non seulement le cheval mange trop de quantité mais la proportion de sucres et protéines est plus élevée.
Le fructane est un sucre de réserve de la plante. Le cheval ne possède pas l’enzyme nécessaire à sa digestion et il est donc fermenté par les bactéries du tube digestif. Chez le cheval, lorsqu’ils sont ingérés en grande quantité́, les fructanes subissent une fermentation lactique, entrainant une augmentation de l’acidité́, ce qui tend à̀ modifier la flore et à affaiblir la barrière digestive. Plusieurs molécules d’origine bactérienne peuvent alors passer dans la circulation sanguine et entrainer une cascade d’évènements (inflammations, modifications vasculaires, activations d’enzymes) conduisant dans les cas plus graves à la destruction de la jonction kéraphylle-podophylle, lésion majeure de la fourbure.
La teneur élevée en sucres solubles et notamment en fructanes de l’herbe de printemps peut entrainer des problèmes métaboliques tels que des fourbures, des ulcères ou des myosites dues à l’effort.
Quelques heures au pré ou dans un paddock bien enherbé peuvent suffire à entrainer des troubles métaboliques sur certains chevaux sensibles.
Faible au début de printemps, plus la surface des feuilles est importante plus le taux augmente.
Si la surface foliaire est élevée et la croissance ralentie par la météo, le fructane s’accumule.
Pendant la croissance de la tige et la montée à graine, le fructane s’accumule.
Après épiaison les fructanes restent élevés mais l’utilisation par la plante est maximale.
Avril et mai sont les périodes les plus critiques.
Au printemps on a souvent des troubles digestifs mais aussi et surtout des élastoses, des chevaux qui ont des problèmes musculaires et des chevaux qui deviennent sensibles sur leurs pieds en raison de l’acidose engendrée par les différents facteurs mentionnés. Les élastoses avec soles qui s’effondrent se voient facilement lorsque l’on soulève le pied, les problèmes musculaires sont aussi facilement notables par le propriétaire, mais parfois on voit juste que le cheval a pris un peu de gras et le pied reste intègre, par contre il est sensible.
On ne peut pas éviter les fructanes dans l’herbe, on ne peut pas changer la météo capricieuse du printemps et l’état de stress des plantes, peu d’entre vous peuvent gérer la mise à l’herbe à raison de 1 à 2 fois 30 min par jour et en évitant les journées à risque et/ou les heures à risque (quand on le fait pendant les mois de mars, avril et mai, je peux assurer qu’on n’évite pas tout dans nos conditions et qu’on se casse la tête chaque jour pour savoir si oui ils vont à l’herbe et combien de temps ). Mais on peut anticiper en rajoutant des fibres digestibles, en diminuant les protéines dans les rations, en équilibrant avec les minéraux nécessaires et en observant au jour le jour le cheval car d’un jour à l’autre on peut observer des effets, et si besoin en adaptant afin de passer au mieux cette phase. Une légère sensibilité du dos pendant plusieurs jours/semaines peut d’un coup se transformer en grande sensibilité sur les petons. Comme à chaque étape, chaque signe est une information à prendre en compte et plus le cheval sera jeune et vigoureux, plus il pourra compenser de lui-même ces déséquilibres passagers ; à contrario, plus il sera vieux, arthrosé, manquant de vigueur ou ayant souffert digestivement de l’hiver, plus les symptômes seront importants au passage à l’herbe.